Quelques comestibles sauvages en érablière privée


Les produits forestiers non ligneux (PFNL) sont des produits d’origine biologique autres que la fibre de bois et qui sont récoltés dans la nature. Les PFNL sont regroupés en trois catégories, soit les produits alimentaires, les produits ornementaux et les produits pharmaceutiques et d’hygiène. Les produits forestiers non ligneux se taillent une place de plus en plus importante dans l’économie québécoise. Cet article se concentrera sur les produits alimentaires, dans un objectif ludique de découverte des ressources de nos boisés et non dans un objectif de commercialisation de ces ressources.


 

Et vos érables dans tout ça?

Saviez-vous qu’il n’y a pas que l’eau des érables qui est comestible? Entre autres, il est possible de manger les graines de l’érable à sucre. Celles-ci sont intéressantes au point de vue nutritionnel, puisqu’elles ont une teneur en protéines de 43 %. 

Il y a plusieurs façons de consommer les graines de l’érable à sucre qu’on utilise un peu comme on utiliserait des noix. Certaines personnes aiment les manger crues, comme collation lors d’une sortie en forêt par exemple, malgré leur amertume. Il est bon de savoir que, règle générale, plus les graines sont grosses, plus elles sont amères. Un truc pour sortir les graines de leur enveloppe plus facilement, c’est de faire tremper les samares dans l’eau pendant environ une heure avant d’en retirer les graines. Une autre façon de préparer les graines d’érable est de les faire bouillir une quinzaine de minutes, puis d’ajouter les épices de son choix. Il est aussi possible de rôtir les graines, préalablement bouillies ou non, jusqu’à ce qu’elles soient dorées. Bouillir les graines en amont permet d’en diminuer l’amertume. Une autre méthode de préparation est de les faire sécher. Entre autres, les graines séchées peuvent être réduites en poudre et servir d’assaisonnement à plusieurs plats ou être mélangées à de la farine standard.

Les samares de l’érable à sucre peuvent être récoltées du printemps jusqu’à leur chute de l’arbre à l’automne. On peut les cueillir directement dans l’arbre ou attendre leur chute à l’automne. Le goût sera différent, alors à vous de tester ce que vous préférez!

 

 

Sécurité du cueilleur

  • En cas d’incertitude, même minime, sur l’identification d’une plante ou d’un champignon, ne le consommez pas. Assurez-vous de bien vous informer sur la façon dont chaque PFNL doit être consommé.

  • Évitez de cueillir sur les sites pouvant contenir des produits contaminants.

  • Informez vos proches de vos déplacements.

 

Éthique du cueilleur

  • Ne jamais cueillir d’espèces menacées ou vulnérables. Dans le cas particulier des espèces vulnérables à la récolte, respectez les contraintes de récoltes décrites dans le Règlement sur les espèces floristiques menacées ou vulnérables et leurs habitats.

  • Cueillez seulement la quantité nécessaire à vos besoins et évitez de gaspiller la ressource.

  • Si vous cueillez sur une terre privée qui ne vous appartient pas, assurez-vous d’avoir l’autorisation du propriétaire.

  • N’endommagez pas le milieu ; utilisez les bons outils, ne piétinez pas excessivement le sous-bois et ramassez vos déchets.


 
Asaret du Canada 

L’asaret du Canada (Asarum canadense), aussi appelé gingembre sauvage, est une petite plante couvre-sol à croissance lente. Elle a deux grandes feuilles vert foncé poilues en forme de cœur de 10 à 18 cm de diamètre. Sa tige et sa fleur sont aussi poilues. Sa fleur unique, cachée à la base des feuilles, est pourpre. Son rhizome, court et jaune, enfoui peu profondément dans le sol, dégage une odeur caractéristique de gingembre. Cette odeur est aussi présente lorsque les feuilles sont broyées.

L’asaret du Canada a le statut d’espèce vulnérable à la récolte au Québec depuis 2005. Cela implique qu’il est possible de récolter au maximum cinq spécimens à l’état sauvage et de vendre un seul d’entre eux. Il est important de respecter cette réglementation, même aux endroits où l’espèce semble abondante, pour éviter de contribuer à son déclin. 

Il est aussi possible de planter le gingembre sauvage dans son érablière, mais il s’agit d’une culture laborieuse. L’asaret préfère un sol riche et humide avec une épaisse couche d’humus. Il faut l’installer à l’ombre et attendre au minimum à la quatrième année avant de commencer sa récolte. En divisant le rhizome à l’automne, on contribuera à multiplier les plants de gingembre. La récolte et le commerce des plants cultivés sont autorisés. L’espèce est disponible dans de nombreux centres jardins. Prenez toujours le temps de vous informer auprès du vendeur de la façon dont il s’est procuré les plants, pour vous assurer que ses pratiques sont respectueuses de la réglementation en vigueur, ainsi que de l’environnement. 

Lors de la cueillette de l’asaret du Canada, on s’intéresse spécifiquement à la récolte de son rhizome. Pour cela, il est nécessaire de prélever l’entièreté du plant en creusant délicatement autour, ce qui tue évidemment le plant. Il est conseillé de récolter les rhizomes au printemps ou à l’automne. 

 

 

Cette plante est appréciée dans le domaine alimentaire pour sa saveur intense et épicée de gingembre. Il y a plusieurs façons de consommer le rhizome de l’asaret. On peut le manger frais, confit, séché, en poudre, en sirop ou sous forme de thé. Il est conseillé de consommer l’asaret avec modération, car il contiendrait une molécule toxique, lorsque consommée en grande quantité. En plus de son intérêt en alimentation, le rhizome de l’asaret du Canada aurait des propriétés médicinales. Il est entre autres utilisé pour soulager les voies respiratoires, pour favoriser la sudation et comme anti-inflammatoire. Dans l’industrie des cosmétiques, les huiles essentielles du gingembre sauvage sont extraites des rhizomes pour isoler les molécules odorantes.

 

Aralie à tige nue

L’aralie à tige nue (Aralia nudicaulis) peut atteindre 60 cm de haut et possède deux tiges lisses qui proviennent du même endroit sur le rhizome. L’une des tiges porte les folioles et l’autre, plus courte, porte les fleurs. La tige la plus longue se sépare en trois parties qui comprennent chacune 5 à 7 folioles finement dentées et dont l’extrémité est pointue. Cette plante porte trois boules de fleurs blanc verdâtre qui donneront de gros fruits pourpres, presque noirs, à maturité. Au début de la croissance des folioles, au printemps, celles-ci ont une teinte rougeâtre et la plante ressemble un peu à l’herbe à puce. Les folioles deviendront vertes, puis tomberont de la plante avant que les fruits soient matures.

Si toute la plante est comestible, le rhizome est la partie la plus recherchée pour son odeur parfumée et son goût agréable. Récolter tout le rhizome tue la plante ; il est donc conseillé de ne pas le prendre en entier. Il existe plusieurs façons de le consommer. Son goût frais est apprécié comme grignotine sauvage lors d’une randonnée. Il est aussi possible de l’infuser dans une sauce ou une marinade par exemple, ou encore de le réduire en poudre et de l’utiliser comme condiment aromatique, que ce soit dans un breuvage ou une pâtisserie. Le rhizome de l’aralie à tige nue était traditionnellement l’un des ingrédients entrant dans la composition de la racinette. En plus du rhizome, il est possible de consommer les jeunes pousses et les jeunes feuilles que l’on cuira comme des épinards. Les fruits, qui ont une saveur résineuse semblable aux fruits du génévrier, peuvent être mangés frais, séchés et broyés en condiment ou encore transformés, pour faire par exemple du vin ou de la gelée. 

Pour bonifier son érablière, il est possible de se procurer des plants d’aralies à tige nue dans de nombreux centres jardins. Il existe des plants mâles et des plants femelles ; ils sont morphologiquement similaires, mais seuls les plants femelles peuvent produire des fruits, lorsque fécondés. Cette vivace à croissance lente aime les sols frais et riches, et préfère le sous-bois à l’ombre où à la mi-ombre. Elle se reproduit surtout de façon végétative, grâce à son rhizome, plutôt que par ses graines. Ce ne sont donc pas tous les plants femelles qui produiront des fruits. Elle peut former de grandes colonies autour du plant parent. 

 


Saviez-vous que? 

Bien qu’on la surnomme salsepareille au Québec, l’aralie à tige nue n’est pas une vraie salsepareille. Les vraies salsepareilles font partie du genre Smilax et ne sont pas présentes dans la province (dommage pour les Schtroumpfs). Cela nous rappelle l’importance des noms latins pour éviter les confusions d’espèces. 


 

Pleurote en forme d’huître

Le pleurote en forme d’huître (pleurotus ostreatus) est présent en érablière mixte et en érablière pure. Bon comestible, il s’agit de la plus répandue de nos espèces de pleurotes. On le retrouve sur le bois des feuillus durs, morts ou vivants, le plus souvent en septembre ou octobre, même s’il est possible de le trouver hors de cette période. Il est conseillé de le récolter quand il est jeune, pour éviter qu’il soit coriace.

Même s’il est possible de trouver un pleurote en forme d’huître seul, on le retrouve le plus souvent en touffes serrées et étagées, dans un agencement rappelant un éventail. Le chapeau de ce champignon, lisse et charnu, mesure de 4 à 20 cm. La couleur du chapeau varie ; elle peut être brunâtre, grisâtre ou blanchâtre. Les lames blanches du champignon descendent longuement sur le pied, rudimentaire et excentré, quand ce dernier est présent. La chair du pleurote en forme d’huître est blanche, tendre et sent légèrement l’anis. Il faut donc porter une attention particulière lorsqu’on vérifie si celle-ci contient ou non des larves. 

Le pleurote en forme d’huître a une saveur très prononcée et accompagne bien les viandes rouges. On peut aussi en faire des potages, entre autres. Il est essentiel de le faire cuire avant la consommation. Comparativement à la plupart des autres champignons, ce pleurote a une plus forte teneur en protéines et en fibres alimentaires.

 

 

Attention de ne pas le confondre avec certains crépidotes, qui mesurent moins de 4 cm et qui sont moins charnus, pour lesquels la comestibilité est souvent inconnue. Pour les distinguer, on peut aussi se référer à leurs sporées. Le pleurote en forme d’huître a une sporée blanche, teintée de lilas à gris lilas, tandis que les crépidotes ont une sporée brune. Certaines espèces de lentins peuvent ressembler au pleurote en forme d’huître, mais les lentins, bien que parfois immangeables, ne sont pas toxiques. Les autres champignons qui peuvent ressembler au pleurote en forme d’huître, soit le pleurote étalé, le pleurote pulmonaire et le pleurote du peuplier, sont comestibles.

Il est possible de faire la culture du pleurote en forme d’huître. Plusieurs méthodes existent, mais, en sous-bois, on peut le cultiver sur des billes de bois. À noter par contre qu’il ne s’agit pas de l’espèce de champignons la plus productive dans ce type de culture. Pour plus d’informations à ce sujet, consultez le guide technique Culture de champignons sur billes en sous-bois de la Faculté de foresterie de l’Université de Moncton disponible en ligne.

 

 

Conclusion

Cet article se veut une introduction au monde complexe des comestibles sauvages présents dans les érablières du sud du Québec. Il existe une panoplie d’autres espèces qui peuvent être consommées, comme la claytonie de Caroline, la clintonie boréale, l’ail des bois, la médéole de Virginie et la maïanthème du Canada. Si le sujet vous intéresse, prenez le temps de vous informer auprès de professionnels et de consulter le Règlement sur les espèces floristiques menacées ou vulnérables et leurs habitats.

Les bordures de chemins plus lumineux en érablière sont aussi des milieux intéressants pour découvrir des comestibles sauvages différents de ceux que l’on retrouve dans le sous-bois. Gardez l’œil ouvert et vous trouverez peut-être des petits fruits comme des amélanches et des baies de sureau, ou encore même des noisettes. Prenez aussi le temps d’apprécier la diversité d’animaux qui sont attirés par ces ressources alimentaires.


 

 

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