La livrée des forêts


 

La livrée est un insecte indigène de l'Amérique du Nord, c’est-à-dire qu’elle est présente dans nos forêts depuis des centaines d’années. Les épidémies s’autorégulent grâce à des facteurs environnementaux, comme un accroissement de prédateurs. La livrée ne menace donc pas la survie des écosystèmes. Elle peut par contre affecter certaines activités humaines. 

 

 

Dommages aux arbres

La livrée est un défoliateur, c’est-à-dire qu’elle consomme les feuilles. Lors d’une épidémie, les arbres touchés peuvent perdre une part importante de leur feuillage, voire l’entièreté. La livrée a été observée sur 29 espèces forestières canadiennes, dont 27 feuillus. Par ordre de préférence, elle touche le peuplier faux-tremble, le bouleau à papier, l’érable à sucre, le saule puis le chêne rouge. Notons que l’érable rouge n’intéresse pas la livrée. 

 

De façon générale, cet insecte cause peu de dommages permanents aux arbres. Comme la défoliation survient tôt dans l’été, les arbres ont le temps de produire une nouvelle feuillaison. Cet effort affaiblit néanmoins les arbres et les rend plus vulnérables aux autres insectes, maladies ou stress environnementaux ou anthropiques. Trois années ou plus de défoliation intense sont nécessaires pour causer la mortalité de feuillus vigoureux. Par contre, les arbres préalablement affaiblis peuvent mourir dès la première défoliation sévère. C’est pourquoi la livrée est considérée comme un assainisseur de forêt. 

 

 

Identifier la livrée

L’agrile est un insecte volant sous sa forme adulte. Par contre, c’est sous sa forme de larve qu’il est le plus dommageable pour l’arbre.  

 

Caractéristiques de la larve : 

  • Longueur jusqu’à 50 mm;

  • Tête grise bleutée;

  • Corps bleu traversé de quatre bandes orangées et d'une rangée de taches blanches en forme de trou de serrure;

  • Présence de très longs poils;

  • Aspect de plus en plus coloré et velu avec les mues.

 

Caractéristiques des masses d’œufs : 

  • De couleur grise;

  • Longueur de 1 à 2 cm;

  • En forme de bague;

  • Situées autour des ramilles;

  • Recouverte d’une écume foncée spumeuse.

 

 

La livrée au fil des ans

La livrée est sous forme d'œufs pendant la majorité de l'année. Les œufs sont pondus au milieu de l'été. Les chenilles apparaissent en groupe de 5 à 200 individus au début mai de l'année suivante, et ce, avec le débourrement des feuilles. Les larves consomment des feuilles jusqu’à leur maturité, soit vers la fin juin. Elles se transforment alors en pupes puis en adultes. 

 


La livrée est toujours présente dans les forêts québécoises. Généralement, les larves sont peu nombreuses, mais périodiquement, il y a des épidémies et on peut alors compter jusqu'à 100 000 livrées par arbre. Cette variation cyclique des populations est influencée par le nombre de prédateurs et autres ennemis de celle-ci, et par la résistance des arbres. Après plusieurs années sans infestation de livrées, les arbres réduisent leur défense et le nombre d'ennemis diminue. Cela favorise les populations de livrées et les épidémies. Le nombre d'ennemis de l'insecte et la défense des arbres s'accroissent alors, ce qui régule naturellement les épidémies.

 

La première épidémie recensée au Québec remonte à 1791. Depuis, les épidémies se produisent aux 7 à 11 ans en moyenne et durent de deux à cinq ans. Pendant ces périodes épidémiologiques, les fortes densités de population se déplacent d'une forêt à l'autre. C'est pourquoi on voit généralement une chute des populations de livrée dès l'année suivant une forte densité, ce qui permet à la majorité des arbres de survivre. 


 

 

Gestion des arbres et des boisés

 

EN MILIEU FORESTIER 

Normalement, les parasites, les prédateurs (oiseaux, guêpes, fourmis), les maladies et le gel maintiennent les populations de livrées à un niveau endémique. Même en période de pullulation, ces facteurs contribuent considérablement (jusqu’à 80 %) à réduire les populations. C'est pourquoi il n’est généralement pas nécessaire d’intervenir en période d’infestation à moins que certaines activités économiques, telle l'acériculture, soient compromises.  

 

Réduire la vulnérabilité de la forêt

Il est préférable d'adapter nos pratiques pour réduire la vulnérabilité des arbres face aux défoliations. Pour ce faire, il est conseillé de consulter un ingénieur forestier. De façon générale, il faut maintenir les arbres dans le meilleur état de santé possible, soit : 

  • Aménager régulièrement le boisé pour que les arbres aient une bonne croissance;

  • Maintenir les arbres les plus sains et récolter les arbres affaiblis ou moribonds;

  • Éviter de blesser les arbres et de compacter les sols;

  • Maintenir une bonne diversité en espèces (l'érable rouge est un atout en acériculture, car il n'intéresse pas la livrée);

  • Réduire les stress imposés aux arbres défoliés en limitant l'entaillage des érables et en évitant les coupes forestières pendant et à la suite d'une épidémie. 

 

Protéger l'activité acéricole

Une forte défoliation par la livrée force les érables à utiliser une part de leur réserve de sucre pour faire une deuxième feuillaison, ce qui réduit la vigueur des arbres. Si l'on craint pour la survie de nos arbres, on peut faire évaluer les risques de subir deux défoliations sévères successives par un professionnel forestier. Ce dernier évaluera la présence de masses d'œufs à l'automne afin d'estimer les populations potentielles de la prochaine année. Il vous conseillera aussi sur la pertinence d’utiliser un insecticide, la seule stratégie de répression à grande échelle. 

Il existe différents insecticides disponibles, dont le BTK qui est un produit biologique touchant tous les papillons (livrée et autres). Il doit donc être utilisé avec parcimonie, même s’il est moins dommageable que les insecticides conventionnels. Cet insecticide est coûteux. Il doit être appliqué par hélicoptère en début de saison et il faut réserver les services d'un professionnel plusieurs mois à l'avance.

 


 

EN MILIEU RÉSIDENTIEL

À proximité des résidences, la livrée peut être une nuisance en période épidémique en raison de sa forte abondance. Les larves peuvent recouvrir les murs des maisons, rendre les chaussées glissantes, etc. Elles peuvent aussi nuire à la santé des arbres ornementaux. Compte tenu de la courte durée des infestations, l'option la plus simple est de tolérer la présence des chenilles. Il existe néanmoins certaines stratégies pour limiter la défoliation sur les arbres d'intérêt. 

 

Combattre la livrée

On peut éliminer les masses d'œufs avant l'éclosion des larves. Il faut inspecter les ramilles des feuillus à la recherche de bagues d’œufs, les enlever et les détruire. 

Une fois que les larves ont commencé à se nourrir, on peut les faire tomber avec un jet d’eau à forte pression. On peut asperger le tronc d'eau savonneuse (1 c. à thé par litre). Il faut aussi les empêcher de gravir l'arbre à nouveau. On peut appliquer plusieurs rangées de ruban adhésif gris à l’envers sur la périphérie du tronc et les remplacer au fil des jours. Notez qu’il est important de retirer le ruban à la fin de la saison pour ne pas étrangler l’arbre lors de sa croissance. On peut aussi appliquer un insecticide tel que le TanglefootMD sur le tronc de l’arbre après la pousse des feuilles pour faire obstacle aux chenilles.

 

 

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