Articles printemps 2023

Le pygargue à tête blanche : mesure de protection à l’égard des activités d’aménagement

Le pygargue à tête blanche, communément appelé l’aigle à tête blanche, est une espèce sensible à l’activité humaine, incluant l’activité forestière. Comme cet oiseau fait son nid au Québec, le printemps est une période où il faut particulièrement faire attention à sa présence. Pour en savoir plus, voyez dans cet article la biologie de l’espèce, ses besoins, ses menaces ainsi que des mesures de protection à l’égard des activités d’aménagement forestier. 

Biologie du pygargue à tête blanche

Répartition

Le pygargue à tête blanche vit presque exclusivement en Amérique du Nord; ses aires de reproduction et d’hivernage sont complètement confinées à ce continent, à l’exception de l’île de Bering, située en Russie. Au Québec, il fréquente régulièrement la partie méridionale de la province où il est observé principalement le long du couloir fluvial (concentration sur l’île d’Anticosti) et dans tout l’ouest de la province, au sud de la baie James et au nord-est de la région d’Ottawa-Hull près des Grands Lacs et des réservoirs hydroélectriques. Cette espèce hiverne régulièrement au Québec, surtout en Outaouais et sur l’île d’Anticosti.

 

 

Alimentation

Le régime alimentaire du pygargue à tête blanche est éclectique. Il varie considérablement selon le lieu et les circonstances entourant la quête alimentaire. Le pygargue à tête blanche préfère le poisson, vivant ou mort, mais il se nourrit également d’oiseaux, surtout des espèces aquatiques, ainsi que de mammifères tels que les lièvres. En hiver, il est surtout nécrophage.

 

Reproduction et mortalité

Les activités reproductrices du pygargue à tête blanche commencent à la fin de mars ou au début d’avril par des parades aériennes et des vocalises. Les membres du couple sont fidèles pour la vie. La ponte a lieu d’avril à mai. Le nid, situé entre trois et six mètres sous le faîte d’un des arbres dominants du territoire de nidification, contient normalement deux œufs. L’incubation dure environ 35 jours et les deux partenaires y participent. Durant cette période, les adultes semblent ne tolérer aucune intrusion intra ou interspécifique dans leur territoire de nidification. L’éclosion est asynchrone, ce qui veut dire que les oeufs n’éclosent pas tous en même temps, mais plutôt selon l’ordre de ponte. Les jeunes commencent à se nourrir seuls, au nid, vers l’âge de 7 semaines. Ils sont en mesure de quitter le nid vers l’âge de 10 à 12 semaines, mais ils dépendent des parents pour une période additionnelle pouvant atteindre 13 semaines. Il arrive même que des familles restent unies pendant tout l’hiver. Cette espèce ne mène pas toujours des activités reproductrices chaque année. 

 

Maturité sexuelle et longévité

Le pygargue à tête blanche atteint la maturité sexuelle entre l’âge de 3 et 6 ans. La longévité maximale de cette espèce avoisine les 20 à 30 ans.

 

 

Hivernage

Le pygargue à tête blanche n’est pas au Québec une espèce entièrement migratrice puisqu’il y hiverne régulièrement. Pour ce faire, il recherche des zones d’eau qui restent libres de glace tout l’hiver, notamment les rapides et les zones d’eau salée.

 

Déplacement et mobilité

Le pygargue à tête blanche est très fidèle à son territoire de nidification. Il amorce des migrations lorsque la nourriture commence à se faire rare. Les distances journalières parcourues lors des migrations varient entre 150 et 200 km. Les déplacements de cette espèce restent des plus complexes et des plus méconnus chez les rapaces d’Amérique du Nord. Le regroupement des observations le long de l’estuaire maritime du Saint-Laurent, au printemps et à l’automne, pourrait s’expliquer par l’hésitation que manifestent les oiseaux de proie à franchir de grandes étendues d’eau.

 

Comportement et adaptabilité

Le pygargue à tête blanche recherche des endroits éloignés du dérangement humain. Il semble qu’il puisse tolérer certaines activités humaines tout en maintenant ses habitudes de vie. Cependant, ce niveau de tolérance est difficile à évaluer et est mal connu. C’est durant la saison de reproduction que les pygargues sont les plus sensibles aux dérangements. Il existe plusieurs mentions de cas où des pygargues ont abandonné un site à la suite de dérangements importants (coupes forestières, construction d’une route, etc.).
Cet oiseau présente une certaine adaptabilité. En effet, des individus utilisent parfois des plateformes de nidification aménagées sur les lignes de transport d’énergie ou au faîte d’un arbre. Le pygargue à tête blanche a également été réintroduit avec succès dans l’État de New York.

 

Habitats

Habitat de nidification

Le pygargue à tête blanche recherche des sites possédant des arbres dominants (feuillus ou résineux) à proximité de vastes plans d’eau pour y établir un territoire de nidification. Plusieurs essences d’arbres peuvent être utilisées pour soutenir le nid et, au Québec, celles qui sont souvent employées sont le pin blanc, le mélèze laricin, le sapin baumier et les épinettes. La taille « normale » d’un territoire de nidification varie entre 1 et 2 km2 alors que le domaine vital de cette espèce couvre entre 10 et 15 km2. Le territoire de nidification comporte un nid principal, des nids de rechange, des perchoirs et l’accès à un plan d’eau. Malgré la grande fidélité de cette espèce pour son territoire de nidification, il existe tout de même un taux annuel de changement de territoire d’environ 12 % découlant de dérangements d’origine naturelle ou anthropique. En l’absence de tels dérangements, un bon territoire de nidification peut être utilisé de 50 à 60 années consécutives. Le pygargue réutilise le même nid année après année. Cela peut donner lieu à des accumulations de matériaux formant des structures parfois imposantes, c’est-à-dire jusqu’à 1 000 kg.

 

Habitat d’hivernage

Le pygargue à tête blanche hiverne en groupe au Québec. Il recherche alors la proximité des plans d’eau qui demeurent libres de glace durant l’hiver. Les sites d’hivernage comportent des perchoirs et des dortoirs où les oiseaux peuvent se regrouper. La superficie de ces sites n’a pas fait l’objet de recherches jusqu’à maintenant.

 

Menaces

Menaces par rapport à l’habitat

La perturbation des habitats, notamment par l’aménagement forestier, l’exploration minière et la villégiature, peut constituer une menace pour le pygargue à tête blanche sur ses sites de reproduction et d’hivernage. En effet, ces activités peuvent modifier des éléments essentiels du territoire utilisé par le pygargue, qu’il s’agisse de la structure de soutien du nid ou de composantes de l’environnement immédiat du nid, ce qui peut par la suite entraîner l’abandon du nid, le bris des œufs, l’envol prématuré des aiglons ou encore l’augmentation de la prédation.

 

Autres menaces

Au Québec, les autres menaces ou causes de mortalité du pygargue à tête blanche qui ont été identifiées sont : le dérangement par les humains, les captures accidentelles dans des engins de piégeage, les collisions avec des structures, l’abattage au fusil et la contamination par les produits chimiques. L’Union québécoise de réhabilitation des oiseaux de proie (UQROP) recense chaque année des cas de mortalité liés à de telles causes. Pour plus d’information en lien avec les différentes menaces, voir le Bilan du rétablissement du pygargue à tête blanche (Haliaeetus leucocephalus) au Québec pour la période 2002-2018 au : 

 https://mffp.gouv.qc.ca/documents/faune/bilan_retablissement_pygargue_2002-2018.pdf.

 

MESURE DE PROTECTION À L’ÉGARD DES ACTIVITÉS D’AMÉNAGEMENT FORESTIER

Le pygargue à tête blanche est une espèce qui a reçu une grande attention de la part des gestionnaires de la faune et des chercheurs. En Amérique du Nord, il existe une quantité importante de normes d’aménagement ayant pour but de réduire les effets du dérangement sur ses activités essentielles. Il apparaît que ces normes visent toutes à protéger les sites de nidification et à y réduire considérablement les activités humaines durant la période reproductrice.

Au Québec, la mesure de protection proposée est la suivante : une zone de protection intégrale entourant le nid et une zone tampon autour de celle-ci.

 

 

Modalités d’application

Aucune activité d’aménagement forestier n’est permise dans la zone de protection intégrale. Les activités sont permises dans la zone tampon du 1er septembre au 15 mars, soit en dehors de la période de nidification de l’espèce. Ces activités ne doivent toutefois pas occasionner la mise en place d’infrastructures permanentes (route, bâtiment, etc.).

Les mesures de protection proposées ne concernent que les activités d’aménagement forestier sur les terres du domaine de l’État. L’industriel forestier et le Ministère peuvent convenir d’adapter les mesures de protection pour tenir compte de certaines particularités du milieu, notamment de la topographie. Ces changements ne doivent toutefois pas nuire à l’occupation du territoire de nidification par le pygargue à tête blanche.

L’application de mesures sur propriété privée est considérée comme une saine pratique sans être une obligation.

 

 


En savoir plus

Pour consulter le document original, visitez le www.mffp.gouv.qc.ca/
nos-publications/mesure-protection-pygargue-amenagement-forestier

 

 

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