Articles hiver 2024

Petit guide de l'apprenti trappeur

Le piégeage des animaux à fourrure a joué un rôle important dans l’histoire du Québec. De nos jours, beaucoup de gens pensent que cette activité n’est plus pratiquée dans la province. Détrompez-vous! Dans les dernières années, la vente annuelle du permis de piégeage a toujours dépassé la barre des 7 000 permis. Armés de leurs pièges, raquettes et d’une grande connaissance de l’animal désiré, les piégeurs jouent un rôle dans la gestion des animaux à fourrure.

Tout comme la chasse, les raisons de piéger sont multiples. Certains le font pour le défi, d’autres pour s’évader dans la nature et admirer sa beauté. Cette activité permet aussi de resserrer les liens familiaux par le transfert des connaissances. De plus, par la vente des fourrures, le piégeur a l’opportunité de rentabiliser son activité. En 2020-2021 au Québec, il s’est transigé quelques 105 003 fourrures pour un revenu total de 1 983 820 $.
Comme le piégeage est une activité bien différente de la chasse et de la pêche, une réglementation particulière s’y applique. Ce guide vous présente les notions de base pour pratiquer le piégeage légalement, en toute sécurité et de façon respectueuse de l’environnement.

 

Une convention sur le commerce international 

C’est au début des années 1960 que commença à se faire sentir l’importance d’une réglementation du commerce des espèces sauvages en vue de les conserver. Puisque ce commerce est mondial, cette réglementation nécessite la coopération de l’ensemble des pays tant exportateurs qu’importateurs d’espèces. C’est dans cet esprit de coopération que la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) a été conçue. Celle-ci a été officiellement adoptée en 1973 pour entrer en vigueur le 1er juillet 1975.

Depuis plus de 35 ans, la CITES a pour but de veiller à ce que le commerce international des spécimens d’animaux et de plantes sauvages ne menace pas la survie des espèces auxquelles ils appartiennent. Les différents pays et états faisant partie de la Convention coopèrent pour réglementer les importations et les exportations de ces espèces afin de les préserver de la surexploitation commerciale. Au Québec, six espèces à fourrure se retrouvent sur la liste de la CITES : le loup, la loutre de rivière, le lynx du Canada, le lynx roux, l’ours blanc et l’ours noir.

Ces espèces ne sont pas menacées d’extinction au Québec cependant, elles sont apparentées à d’autres qui sont considérées comme telles ailleurs dans le monde.

Pour exporter hors du Canada ces animaux, leurs parties, leurs dérivés ou autres produits obtenus à partir de ces espèces, une licence d’exportation CITES doit accompagner ceux-ci pour que l’entrée en soit permise dans le pays importateur.

Pour en apprendre davantage sur le sujet, visitez le site d’Environnement Canada au www.ec.gc.ca/cites ou encore le site de la CITES au www.cites.org.

 

Le piégeur et l’environnement

Le respect de l’environnement et de la faune est l’une des qualités que tout piégeur doit posséder. Un bon trappeur exercera une gestion de son territoire afin de conserver un niveau de population qui lui assurera une récolte durable. Par une bonne stratégie de gestion de son territoire, le piégeur prélèvera un certain pourcentage afin de ne pas épuiser la ressource. D’ailleurs, le mot « professionnel » qui s’ajoute au permis de piégeage témoigne de l’importance d’une bonne gestion de son territoire pour les piégeurs.

Lors de l’achat du permis de piégeage, une portion du montant payé est versée à la Fondation de la faune du Québec. Par cette simple action, vous permettez à la Fondation de supporter différents projets de conservation et la mise en valeur de la faune et de son habitat.

Le choix de pièges certifiés et d’une bonne technique d’installation afin d’éviter la capture accidentelle d’espèces non visées, et le nettoyage des sites d’appâtage lors du retrait des pièges ou des collets sont quelques-uns des gestes qu’un bon trappeur met en pratique. De plus, il s’assure de maintenir de bonnes relations avec les autres usagers du milieu pour conserver une perception positive de cette activité auprès des non-initiés.

Certains milieux, tels que les tourbières et les frayères, sont plus fragiles que d’autres. Il est important de les reconnaître afin de les préserver en évitant d’y circuler en véhicule motorisé. De plus, les habitats fauniques sont protégés en vertu des lois. Alors, les activités susceptibles de modifier l’habitat d’un animal ou du poisson sont réglementées.

 

Pour ne pas vous piéger

Cette activité comporte certains risques pour le piégeur ainsi que pour les usagers de la forêt et les animaux domestiques. La prudence est de mise lors de vos sorties d’installation ou de vérification de vos engins de piégeage. Quelques petites règles de sécurité vous permettront de profiter pleinement de cette activité.

  • Avant de partir pour une journée de piégeage, avisez quelqu’un de votre entourage du lieu de piégeage et de l’heure de retour prévue. De cette façon, si un accident survient, les secours pourront réagir rapidement.

  • Certaines techniques nécessitent l’abattage de l’animal à l’aide d’une arme à feu. Il faut alors suivre toutes les règles de sécurité entourant l’usage d’une arme à feu.

  • Comme le piégeage se pratique dans les forêts publiques et privées, il faut être conscient que les pièges peuvent être dangereux pour les autres usagers de la forêt. Installez toujours vos engins de piégeage éloignés des sentiers et marquez l’emplacement de ceux-ci avec un ruban voyant.

  • Prenez toutes les précautions nécessaires pour éviter de capturer un animal domestique.

  • Sur un terrain privé, il est recommandé d’aviser le propriétaire de l’emplacement de vos pièges, ainsi il pourra les éviter plus facilement.

  • Une bonne connaissance des engins utilisés diminue le risque d’accident relié à leur usage.

  • Assurez-vous de noter l’emplacement de tous vos pièges et de les visiter régulièrement.

  • Assurez-vous de retirer tous vos pièges et collets dès la fin de votre saison de piégeage.

 

Manipulation de l’animal

Comme le gibier vit dans la nature, il est sujet aux maladies et aux parasites qui, dans certains cas, peuvent se transmettre à l’homme (zoonose). Afin d’éliminer ces risques, certaines précautions doivent être prises lors du dépeçage de la carcasse, de l’apprêtage de la fourrure et de la préparation de la viande.

  • Assurez-vous que l’animal est bien mort avant de le manipuler pour éviter les morsures.

  • Sur le terrain ou à la maison, lorsque vous touchez l’animal, il est conseillé de porter des gants à usage unique (style latex).

  • Portez un masque et des lunettes afin de réduire grandement les risques de contraction de certaines zoonoses comme la tularémie (rat musqué, castor et lièvre).

  • Lavez-vous les mains et les avant-bras à la fin des manipulations.

  • Nettoyez bien les outils ayant servi à la préparation.

 

Conservation et consommation de la viande

  • La viande de certaines espèces peut se consommer (exemple : le castor, le lynx, l’ours, etc.). Toutefois il faut prendre certaines précautions pour éviter la transmission de maladies. 

  • La viande fraîche doit être conservée dans la partie la plus froide du réfrigérateur, soit entre 0 °C et 4 °C, ou au congélateur à -18 °C ou moins.

  • La consommation des viandes ou abats présentant une couleur, une odeur ou une texture anormale devrait être évitée. 

Afin d’éliminer d’éventuelle contamination par les parasites et bactéries, la viande devrait atteindre une température de cuisson de 77 °C. Cette mesure est très importante pour les viandes de l’ours et du sanglier qui peuvent être l’hôte de parasites (trichines) qui causent la maladie de trichinose chez l’homme. La viande de lièvre doit également être bien cuite pour éviter les risques de tularémie.
Pour le bien-être de votre animal de compagnie, ne lui donnez pas de foie ou de poumon à manger. Vous pourriez lui transmettre des parasites.

 

Certaines maladies à surveiller

La gale sarcoptique

La gale sarcoptique est une maladie qui atteint plusieurs espèces fauniques. Elle est causée par un parasite qui provoque une dermatite (lésions de la peau) sévère, pouvant même engendrer la mort de l’animal (l’animal meurt de froid en hiver dû à une perte de poils importante). Elle a été observée chez des loups, coyotes et renards. Cette maladie est transmissible à l’humain et aux animaux de compagnie. Par prévention, il est recommandé de porter des gants lors de la manipulation d’animaux atteints et de brûler les spécimens présentant les symptômes de cette maladie.

La rage

La rage est une maladie infectieuse incurable et mortelle causée par un virus qui s’attaque au système nerveux des mammifères, y compris celui des humains. Cette maladie peut être transmise par plusieurs animaux sauvages, mais les principaux en Amérique du Nord sont les chauves-souris, les ratons laveurs, les mouffettes et les renards.

Depuis 2006, le gouvernement québécois a mis en place un plan de lutte pour enrayer la menace de la rage du raton laveur suite à la découverte d’un premier cas en Montérégie. En fait, ce plan vise non seulement les ratons laveurs, mais également, les mouffettes et les renards roux. Il est déconseillé d’approcher un animal présentant des symptômes de cette maladie, de porter des gants lors de la manipulation et de bien se laver les mains (un bon 10 minutes avec du savon) ainsi que les instruments qui ont été en contact avec l’animal. 

 

Certificat et permis

Au Québec, toute personne désirant piéger doit d’abord, posséder un certificat du piégeur, être titulaire d’un permis de piégeage professionnel et le porter sur elle. Pour obtenir un certificat de piégeur, il faut être âgé d’au moins 12 ans, suivre la ou les formations nécessaires et réussir les examens.  La formation de base se nomme Piégeage et gestion des animaux à fourrures (PGAF). Si vous décidez de piéger des animaux dont l’abattage avec une arme à feu est nécessaire, une seconde formation est nécessaire le Cours canadien de sécurité dans le maniement des armes à feu (CCSMAF). 

Pour plus d’information sur les différentes formations, consultez le site de la Fédération des Trappeurs Gestionnaires du Québec : www.ftgq.qc.ca.

Ensuite, il ne vous reste plus qu’à trouver un endroit où vous pourrez installer vos pièges en n’oubliant pas de demander la permission au propriétaire si vous êtes sur des terres privées. 

Une fois toutes ces étapes franchies, vous pouvez piéger en toute légalité avec de bonnes connaissances de la réglementation.

 

Règlements

Pour que le piégeage demeure une activité durable, des règlements et limites ont été définis. Premièrement, des périodes de piégeage ont été établies en fonction de la vulnérabilité de l’espèce ainsi que sa période de reproduction, sa rareté relative, sa qualité de la fourrure, etc. Deuxièment, des limites de prise pour certaines espèces comme l’ours noir et le lynx du Canada ont été établies en fonction de l’état des populations. D’ailleurs, ce sont les seules espèces qui ont un quota de capture.

Ensuite, afin de réglementer adéquatement les activités de piégeage, le Québec a été séparé en 96 unités de gestion des animaux à fourrure (UGAF). Chaque unité présente une réglementation qui lui est propre. Il faut donc prendre connaissance des règlements à chaque année pour vérifier entre autres, les périodes de piégeage, le type de piège autorisé par espèce, les modifications de limite ainsi que toutes nouveautés législatives. Le tout est disponible sur le site du Gouvernement du Québec au www.quebec.ca/tourisme-et-loisirs/activites-sportives-et-de-plein-air/piegeage.

 

Aide-mémoire

  • Porter son permis sur soi en tout temps.

  • Un seul permis par piégeur.

  • Permis valide à compter de sa date de délivrance jusqu’au 1er juillet suivant cette date.

  • Pour être valide, le nom, l’adresse et la date de naissance du titulaire doivent figurer au verso du permis.

  • Le permis donne droit à une limite de prise pour certaines espèces comme l’ours noir et le lynx du Canada.

  • Le permis n’est pas transférable d’une personne à l’autre à l’exception des conjoints et enfants. Pour ceux-ci, il est possible de piéger sous le permis d’un autre piégeur. Toutefois, le permis donne droit à une limite de prise pour l’ensemble des personnes piégeant sur ce dernier. 

 

Quelques bonnes pratiques à ne pas oublier

  • Le piège doit être posé de façon à ce que l’animal ait toujours un point d’appui au sol.

  • Les pièges à ressort ou à patte dont les mâchoires sont munies de dents, crocs, griffes ou barbelés sont illégaux.

  • Un chien peut être utilisé seulement pour localiser le rat musqué aux fins de le piéger.

  • Seuls les leurres et les appâts sont autorisés. L’usage d’appel est interdit.

  • Il est défendu d’utiliser un poison, un explosif, une substance délétère (nocive) ou une décharge électrique pour piéger.

 

Prise accidentelle

Il arrive parfois que certaines espèces non désirées soient prises au piège, que l’espèce prise soit interdite à cette période ou que le type d’engin soit non autorisé pour cette espèce ou encore que la personne ne soit pas titulaire du bon permis. Dans tous les cas, si l’animal est indemne et vivant, il doit être remis en liberté sans délai. Si vous capturez un oiseau de proie, vous devez le libérer rapidement, qu’il soit vivant ou mort. Si l’animal est blessé ou mort et s’il s’agit, en autres, d’un carcajou, d’un cerf de Virginie, d’un couguar, d’un coyote, d’un loup, d’un lynx du Canada, d’un lynx roux, d’un opossum d’Amérique, d’un orignal, d’un ours noir ou d’un oiseau de proie, le piégeur doit le déclarer rapidement à un agent de protection de la faune et si nécessaire, lui remettre l’animal.

Il est du devoir du piégeur d’utiliser au maximum ses connaissances pour éviter que cela ne se produise. Par exemple, pour réduire le risque de capturer un oiseau de proie, de simples précautions lors de l’aménagement d’enclos peuvent être prises :

  • Bien cacher ou enterrer l’appât sous la terre et le fixer solidement;

  • S’assurer que l’enclos n’est pas près d’un endroit dégagé où l’oiseau peut se poser;

  • Ne pas dégager l’enclos, ainsi l’appât ne sera pas visible du haut des airs;

  • Bien distancer les appâts et les pièges dans un enclos ouvert, ainsi l’oiseau pourra se poser directement près de l’appât sans se prendre dans vos pièges.

 

Transport des ours noirs

Pour l’ours noir, on retrouve quatre coupons de transport associé au permis de piégeage. Lors de la capture d’un ours noir, le trappeur doit avant même de déplacer la bête, détacher de son permis un des coupons et l’attacher à l’animal. Même s’il y a quatre coupons, le piégeur doit s’assurer de respecter le quota fixé pour l’UGAF où il trappe. Il doit ensuite faire enregistrer l’animal auprès d’une personne, d’une société ou d’une association autorisée par le Ministère et payer les frais pour l’enregistrement de l’ours noir.

 


 

Le piégeage, un outil de gestion dans nos forêts

Association forestière du sud du Québec

 

Bien que le piégeage ne soit plus une activité très lucrative, elle n’en reste pas moins une activité très utile. 

La présence de l’être humain et ses activités ont profondément changé la dynamique des espèces animales forestières. Certaines populations ont décliné alors que d’autres se sont fortement développées, créant des déséquilibres. La chasse et le piégeage sont des moyens pouvant aider au rétablissement des populations. 

Le piégeage peut aussi contribuer à la gestion des conflits entre l’animal et l’humain. La Fédération des Trappeurs Gestionnaires du Québec (FTGQ) encourage la cohabitation, mais la capture d’individus peut être nécessaire selon les cas. Par exemple, le castor crée des mots de tête à plusieurs. Installer des protections de ponceau empêchant les castors de les bloquer est une stratégie plus efficace à long terme que de capturer un castor présent, car un second peut rapidement prendre sa place. D’un autre côté, un problème de gestion causé par une surpopulation ne sera pas réglé par des aménagements de ponceau. 

Vous désirez engager un trappeur pour vous aider à réaliser une gestion durable de la faune de votre boisé, communiquez avec l’une des associations régionales affiliées à la FTGQ à l’adresse www.ftgq.qc.ca/devenir-membre

 


En savoir plus

Pour consulter le guide complet ou en savoir plus sur la Corporation de l’Aménagement de la Rivière l’Assomption, visitez leur site Internet à l’adresse suivante : www.cara.qc.ca

 

 

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